Vélibre

Vélo. Libre. Vélibre.

Étiquette : La Bretagne par la cote

  • Jour 2 pluie

    Eh oui, ça arrive, il a plu cette nuit. Une petite dépression est passée, avec sa petite traînée qui a arrosé l’ouest de la France, en même temps à Brest et Cancale. Mais vraiment la dépression qui veut se la péter, un bon vent force 4-5, du genre vous allez voir ce que vous allez voir. Et qu’a-t-on vu? Un petit crachin de rien, qui n’a même pas fait peur aux parisiens voisins d’emplacement de camping. Ça ne m’a même pas empêché de dormir. La tente a un peu tangué, mais vraiment pas de quoi faxer à sa mère (ça faisait longtemps!). Je dis au revoir à mes voisins, ils vont aujourd’hui à Dinard, puis rentrent ensuite en deux jours à Rennes. Ils viennent de faire un morceau de la Veloscenie, c’est leur premier voyage. Une des filles me demande pour la deuxième fois par où je passe pour aller à Saint Malo, je sens une petite angoisse. « Vous n’allez pas prendre par la côte quand même? Vous allez prendre la départementale? » Je sens l’inquiétude dans sa voix. Et je lui répète que je ne sais pas, je suis mon itinéraire. Et c’est vrai!

    «  Il paraît que la Bretagne c’est … ». Elle fait un signe avec sa main, comme un vague.

    – Oui ça monte et ça descend sans arrêt, pas longtemps, mais ça n’arrête pas.

    – oui c’est assez physique, il paraît,

    – oui mais en même temps, c’est aussi pour ça qu’on fait ça! ».

    J’adore! Je ne suis pas sûr de l’avoir rassurée.

    Départ pour la pointe du Grouin, à deux roues du camping, évidemment. Ça souffle encore, mais il fait beau. Il y a quelques promeneurs, ils semblent un peu perdus, à regarder à droite, à gauche, comme si une voiture allait passer devant eux. On a l’air un peu con quand on est touriste en fait.

    Fini la baie paisible du mont Saint Michel. C’est maintenant une côte rocheuse, j’attaque la route qui longe la mer, à flanc, devant moi une côte rocheuse découpée et parsemée de pointes multiples, la mer bleue un peu émeraude sur la droite, le ciel bleu délavé. Je me prend une grosse baffe, tellement c’est beau. Dès le matin, dès les premiers mètres. J’adore vraiment la Bretagne. C’est après la pluie que c’est le plus beau. La lumière.

    J’ai une chose à vous avouer, le voyage à vélo, c’est un peu les montagnes russes des émotions. Un moment, on en bave dans une côte, on se demande ce qu’on fait là, et l’instant d’après on s’extasie devant un paysage splendide. Et puis on se fait une frayeur dans une descente. Et puis on fait une brève rencontre, et puis on se demande où on va dormir le soir, et comme ça sans arrêt. Je ne veux pas vous le vendre, mais Space Montain, à côté, ça ne peut pas lutter.

    J’alterne entre la côte et les villages, j’ai un peu toujours le doute, la peur de rater quelque chose alors que je suis passé à côté. Étrange, non? Et d’ailleurs ça arrive, aux Pays-Bas, je suis passé complètement à côté d’une zone humide qui a l’air incroyable. Mais bon, il faut faire des choix. C’est de toutes façons très beau. Je fais un écart par Minihic, et je rentre dans Saint Malo. Déjà! Vu incroyable sur la plage du Sillon.

    Je vais trop vite. Je rentre dans la ville par l’est que je ne connais pas. C’est très beau, il y a de belles demeures bourgeoises dans le quartier des thermes maritimes, puis il y a un minuscule quartier de maisons plus modestes, au style très anglais. Et puis c’est l’entrée dans la ville, la plage du Sillon, les remparts, la vieille ville. Je suis venu en 2020, et j’avais fait une ballade sur la plage avec Evelyne. Il faisait un temps épouvantable, comme souvent. Mais comme disait un ami breton, la Bretagne c’est toujours beau, même quand il pleut. Aujourd’hui ce n’est pas le cas, il fait très beau. Un tour rapide de la ville, très fréquentée bien sûr, et je prend le bateau pour la traversée de la Rance. Ma sœur m’avait conseillé de prendre le bac, donc je m’exécute. Et puis j’adore les bacs. La traversée est très rapide, je fais le touriste bien sûr. Je ne suis pas le seul, les appareils photos sont de sortie. Un type a un appareil compact LUMIX qui doit dater des premiers appareils photo. Saint Malo s’efface lentement et fait place à Dinard.

    Je descend du bateau, enfourche ma bicyclette, et démarre dans un silence impressionnant. Je me dit qu’elle est très bien réglée. Le couple a l’appareil photo me regarde passer, avec un mélange d’air impressionné et envieux. Souriants. Je leur souhaite de bonne vacances, j’entends crier « vous aussi » derrière moi.

    L’ambiance de Dinard est très différente de Saint Malo. Je ne saurais qu’en dire, mais je n’aime pas tellement, en fait. Et puis trop de monde pour moi. Je pars pour une partie de la côte que je connais pas, Saint Lunaire et Saint Briac, jusqu’au cap Fréhel. Je mange une crêpe à Saint Lunaire et fait une vraie pause à Saint Briac, sur la place de la poste. Entre les deux, je traverse des micro villages, fleuris, charmants. Très beau parcours dans les ruelles.

    Je me perds pas mal dans Saint Lunaire. D’ailleurs je me perd pas mal aujourd’hui. C’est un jour ballade découverte. Au hasard. Je ne saurais pas dire par où je passe entre Dinard et Saint Briac, je vagabonde. Je m’extasie devant un de ces moulins multicolore pour enfants, que je voyais dans mon enfance, et que bien sûr on n’a jamais acheté. Vous savez, dans une de ces boutiques colorées, avec tout un tas de jouets de plage, cerf-volants, ballons, bateaux gonflables. Avec des articles qui débordent jusque sur le trottoir, et qui aimantent le regard des enfants.

    Saint Briac est très sympa, joli village, ambiance vacances familiales. Il y a beaucoup d’étrangers, je suis surpris. À force de dire la Bretagne par ci, la Bretagne par là, faut pas s’étonner, ça commence à se savoir.

    Il y a a priori beaucoup de plages dans le coin, j’hésite à aller à celle de saint Briac, la plage de l’islet ou celle de Saint-Sieuc, mais vu l’heure légèrement tardive je décide de traverser la baie et d’aller à Saint-Jacut-de-la-mer. J’ai repéré un camping qui sera parfait pour explorer la pointe du Chevet.

    Pour une fois j’arrive au camping assez tôt, il est complet bien sûr, mais j’obtiens une place dans le coin des randonneurs, qui se sont déjà installés en nombre. Je monte ma tente, et je me dis que je vais aller voir la pointe, sans les sacoches. Les voyageurs à vélo apprécient d’aller faire du vélo sans sacoche, c’est tout d’un coup tellement léger et facile. Je resort du camping, prend le chemin de la pissotte. Un terre plein latéral herbeux offre un point de vue sur la baie magnifique. Je vais pour m’y poser et prendre une photo, j’avise une ornière assez profonde, j’accélère pour la passer en force, mais pas assez, la roue avant se plante dans l’ornière, je fais un petit soleil, et fait un roulé boule dans l’herbe. J’ai eu du bol, je suis passé à côté d’une grosse pierre qui empêche les voitures de se garer à cet endroit. Vous voyez le genre de pierre? Des gens viennent vers moi, prennent de mes nouvelles. Je me redresse, je n’ai rien, je les rassure et les remercie. Je regarde, non, je n’ai rien, vraiment de la chance. Ah François tu as voulu te la peter sans sacoches? Et ben voilà. Je remonte sur le vélo qui n’a a priori rien, j’ai eu peur pour la fourche, a priori pas de bobo pour le vélo non plus. Ouf!

    Je remonte sur le vélo et reprend mon chemin, je démarre lentement pour voir si tout va bien. Ça a l’air d’aller. Je fais 20m et tout d’un coup j’entends « klong klong » à l’arrière. Je devine déjà. Je m’arrête, descends du vélo, regarde et voit le dérailleur arrière pendre lamentablement. Est ce le dérailleur qui est cassé ou la patte de dérailleur?

    Pour les novices en voyage à vélo, et en vélo tout court, sachez que les vélos des années 2020 ont tous une patte de dérailleur qui est spécifique à la marque de vélo, voire au modèle de vélo. C’est mon cas. La patte de dérailleur est une pièce qui relie le dérailleur arrière au cadre. Elle est faite pour casser, pour épargner le dérailleur, et ke cadre, en cas de choc, car un dérailleur coûte plus cher. J’ai appris ça à mes dépends lors de mon tout premier vrai voyage, dans les environs de Dunkerque. Et donc, comme cette pièce est spécifique au vélo, il est presque impossible de trouver une patte de dérailleur de remplacement en cas de casse. Même sur les vélos décathlon, c’est comme ça, un vendeur me l’a confirmé. Donc il faut ABSOLUMENT commander une patte de dérailleur de rechange, au cas où elle arriverait à casser. Ne me demandez pas pourquoi c’est comme ça, c’est incompréhensible.

    Je regarde le dérailleur. Il fait peine à voir. Tout à l’air bien tordu. Est ce que la chaîne ou la platine à galets est tordue? Je m’étonne d’avoir pu rouler après la chute, même 20m. Peut être ai-je cassé quelque chose en roulant? Je regarde de plus près, et je vois que c’est la patte de dérailleur qui a cassé. Bon, évidemment, j’en ai une de rechange. Mais est ce qu’il n’y a pas autre chose? Je rentre à pied au camping qui est à 100m maximum. Je m’installe pour réparer devant l’accueil. Je démonte la roue, j’enlève la chaîne, elle n’a pas l’air tordue. Le patron du camping vient vers moi et me dit qu’il y a un petit atelier de mécanique vélo si j’ai besoin. Adorable. Je lui demande un peu de produit vaisselle car je m’aperçois que la chaîne est dégueulasse. J’enlève la pâte de dérailleur cassée, monte la neuve, remonte le dérailleur. Tout à l’air bien aligné. Je remonte la roue, elle tourne parfaitement. Bon, a priori, il n’y a que ça, cette patte de dérailleur. Elle vous épargne une casse du cadre, mais peut vous saborder un voyage. Parce que franchement c’est stupide, il est tout à fait possible de trouver un dérailleur n’importe où. Mais pas une patte de dérailleur spécifique, c’est impossible. Depuis un an ou deux, sont apparues des pattes de dérailleur UDH, Universal Derailleur Hanger. A priori donc, elle vont sur tous les vélos, conçus pour elles. Mon prochain vélo aura une de celle là, c’est sûr!

    Il me faudra un certain temps pour remonter la chaîne après l’avoir dégraissée, j’essaye le vélo, et tout semble OK. Je pars dans Saint Jacut car il est maintenant 19h avec toutes ces conneries, et il faut que je trouve à dîner. Ce soir ce sera crêperie ! Avec crêpe à l’andouille , ma préférée. Et une bouteille de cidre. Les montagnes russes des émotions!

  • Première étape

    Départ jour 1 de la Bretagne à vélo. Les amis, les amis, les amis! Quelle journée. D’abord j’ai très bien dormi et ça c’est cool. Je recommande le camping de la Sélune. La Sélune est un fleuve qui passe à Pontaubault. Oui techniquement c’est un fleuve, il se jette dans la mer. La Sélune est célèbre pour avoir été franchit par le général Patton. Néanmoins, ce ne sera pas l’événement de la journée, mais plutôt le passage au Mont Saint Michel. Départ sur une petite route, qui tournicote le long de l’estuaire. En deux minutes, c’est le bonheur. J’adore ce genre de route. J’ai devant moi plus d’un millier de kilomètres, mais le premier est déjà super enivrant. Le vélo est super vif, il réagit au moindre coup de pédale, il vire très bien malgré le poids à l’avant. En fait, je me dit qu’il ne faut pas grand chose pour me rendre heureux. Très vite la route se transforme en voie verte, qui va aller jusqu’au Mont. C’est la fin de la Veloscenie. Il y a pas mal de panneaux « le Mont Saint Michel », au cas où certains, un peu perdus, seraient venus là par hasard, passer des vacances tranquilles dans l’anonymat. C’est raté. La première chose qui me choque c’est la présence d’un nombre incroyable de cyclistes. Je crois n’avoir jamais vu une telle concentration. Et l’immense majorité sont des randonneurs. Des couples, des familles, parfois avec de jeunes enfants. Et pas tant que ça de vélo électriques. La France serait elle devenue une patrie de cyclistes? L’effet Pauline Ferrand-Prévot? Non, pas déjà ! À voir dans la durée si ça se confirme.

    Le Mont se rapproche de plus en plus. C’est vraiment cool de se rapprocher lentement du Mont, à vélo, on a le temps de le voir, l’observer, voir les patis semés d’animaux (vous avez la réf?), les bottes de foin qui sèchent sous le soleil, les chenaux qui divaguent dans la lande. Il fait beau, et les couleurs sablées du mont et de la baie se confirment.

    Je m’arrête à environ 1,5km pour faire un vol de drone. C’est long un kilomètre. Je m’arrête à 200m environ. Fait un tour. Mais je suis trop loin, je ne veux pas trop me rapprocher, non plus. La perspective est de toutes façons incroyable. Je rentre le drone et j’arrive à Beauvoir, le village sorte de camp de base pour le Mont. Je raconte ça comme ça, mais un vol de drone est un moment assez excitant. Un peu peur de perdre le drone, de manque de batterie, de ne pas faire les bons mouvements, de ne pas avoir la bonne lumière. Mélangée au plaisir d’une expérience unique, de voler, impossible à vivre autrement.

    Direction le mont! À vélo, on a cette chance de pouvoir aller jusqu’au mont avec le vélo. On prend la même route que la navette, le pont qui passe au dessus de la presqu’île. Avec un long virage vers la gauche. Épique. Les trottoirs sont encombrés en cette période estivale. Étant quasiment le seul cycliste à passer à ce moment là, ça a un petit air d’arrivée d’étape du Tour de France à l’Alpe d’Huez. Arrivée au mont, c’est toujours impressionnant cette construction en pierre. La mer est basse, dommage, j’adore le moment où la mer remonte vers la terre. Les couleurs de la baie changent complètement, le sable est lentement remplacé par le bleu et le vert. Mais il est bien trop tôt pour cela. Je repars donc, il est midi, et le bar restaurant de la digue me tend les bras. J’achète deux babioles dont une part de flan (j’adore le flan!), de quoi boire car j’ai très soif, et monte sur la digue. Vue sur le mont. Les touristes n’ont pas encore déjeuner donc c’est assez calme malgré une baraque à frite avec de la musique 🙄. J’admire quand même la vue en mangeant. J’adore le Mont Saint Michel.

    Je traverse le Couesnon, frontière naturelle entre la Normandie et la Bretagne. Mon voyage démarre ici. C’est parti! Mon itinéraire prend normalement un chemin qui longe la baie, mais il y a une barrière métallique qui empêche le passage. c’est un GR mais je n’ai pas envie de braver l’interdit. Je suis trop respectueux des règles pour la franchir. Je décide de faire un deuxième vol de drone d’ici. Un type qui passe à pied manque de marcher sur le drone que je suis en train de préparer. Il fait un tour puis revient vers moi. Il vient voir sur l’écran, regarde l’image, il n’est pas français, mais il dit « Bon…! ». Il reste les yeux fixés sur l’écran. Je lui tend la télécommande pour lui montrer, car je sens que ça lui plaît terriblement. « Bon! ». Je reprend la télécommande pour continuer le vol, mais je la garde entre nous deux, afin qu’il puisse voir le vol. Je bouge une manette légèrement, et le drone se déplace latéralement, doucement, de droite à gauche. Le mont défile sur l’écran. « Bon…! ». Il y a des moments que j’aimerais avoir pu enregistrer, la voix de cet homme, qui découvre un truc incroyable. Impossible à décrire. Mais je suis heureux de lui avoir fait ce plaisir.

    Je prend la route vers Pontorson, ce n’est pas direct mais il n’y a pas tant d’autres choix. C’est en fait une zone de polders, entre le mont, Pontorson, et vers l’ouest presque vers Saint-Benoit-des-Ondes. C’est très plat et je traverse la zone quasiment déserte, a traversé les plantations maraîchères. Il fait très chaud. Je n’ai pas pris de casquette, ai je eu tort?

    Et puis je rejoins une vélo route, c’est la vélo maritime, EuroVelo4, qui vient de Kiev et va à Morlaix. Donc je vais la suivre. Elle ressemble à la Veloscenie, le même genre de gravier très fin. Ombragée, c’est parfait avec cette chaleur. Je suis officiellement en Bretagne! Je rejoins le bord de la baie, il fait vraiment très chaud, et je décide de m’arrêter à Cherrueix. Un café avec terrasse sera parfait pour me reposer. Ce sera ma première crêpe beurre sucre. J’adore aussi m’arrêter dans les villages, prendre un petit café. Écouter, observer. Le jeune serveur très sympa me conseille d’aller à Saint-Suliac, qui est au bord de la rance. C’est en dehors de mon itinéraire mais bon, à voir.

    L’itinéraire longe la baie, que je découvre. C’est très sauvage, je n’aurais pas cru. Une longue plage déserte, bordée de lande, c’est le festival des couleurs. Bleu, vert, jaune, brun, ciel bleu avec nuages. Un millefeuille de couleurs.

    Je vais au camping de la pointe du Grouin. J’ai appelé, c’est complet, mais je vais tenter ma chance. Je traverse Cancale, par le haut. J’étais venu il y a quelques années en télétravail, à la sortie du premier confinement. C’était génial. Nous avions loué avec des amis un appartement dans une maison, en étage. Avec un balcon en fer forgé, orné d’hippocampes. Quand les propriétaires ont appris que j’étais en télétravail, ils m’ont proposé de me prêter gratuitement un studio au rez de chaussée, le wifi serait meilleur. Le studio donnait sur la baie de Cancale, face à la mer. Une très belle semaine de travail, où je sortait faire des pauses sur le quai, et fumer des cigarettes. À la fin nous sommes allés visiter le Mont Saint Michel, il n’y avait personne. Nous devions être dix en tout à visiter la basilique. Un très bon souvenir !

    Cancale

    J’arrive au camping, j’attends un peu, et le gérant, très sympa, me trouve une place dans un coin au bout du camping. Une place de dépannage, me dit il. Nous sommes quelques tentes sur une fine langue de terre, sur une falaise avec vue imprenable sur les îles de Cancale. Je veux bien prendre un emplacement de dépannage comme ça tous les jours!

    Vue du camping sur les îles de Cancale

    Une très belle journée!

  • Départ pour le Mont Saint Michel

    Je ne pars pas de Bretagne, je dis ça pour les normands susceptibles, mais je pars de la frontière avec la Bretagne. J’adore le Mont Saint Michel et je dis ça parce que c’est vrai. J’y suis allé la dernier fois en vélo, en suivant la Veloscenie, une vélo route à travers l’île de France, la Beauce, le perche, et la Normandie. Deux fois déjà depuis le confinement. J’aime la baie, en particulier, les couleurs sont incroyables, les bleus, les verts, les gris. Je n’y ai jamais vu un franc beau temps, toujours un mélange de soleil et de nuage, parfois de pluie et c’est ça qui donne de si belles lumières.

    Je vais prendre le train à la Gare Montparnasse, et c’est déjà un petit voyage de traverser Paris à vélo, équipé pour le voyage. En ce mois d’août, Paris s’est vidé, et il y a une ambiance de vacances estivales, accentuée par quelques touristes de nationalité inconnue. Il fait assez beau, et les bords de Seine ont mis tous leurs ponts dehors et ils prennent un bain de soleil. Le Louvre a fière allure.

    Le train n’est pas annoncé, il faut donc attendre un peu, j’en profite pour aller m’acheter un en-cas. Il y a toujours une petite angoisse au départ d’un voyage, même si c’est en terrain connu. J’ai fini mes baguages ce matin, levé à 8:30, j’ai fait et défait chacun de mes sacs trois fois, et je suis assez content d’avoir laissé deux maillots, un zoom d’appareil photo et tout un tas de babioles dont je ne me serai pas servi. Je me suis quand même confectionné un nouveau porte bagage en alu, pour pouvoir fixer des choses sur le guidon. J’avais hier utilisé une barre de 6mm de diamètre, mais ça me paraissait un peu trop fragile pour mon paquetage , je m’en suis refait un autre ce matin avec une barre de 8mm. J’ai même eu le temps de changer mes rubans de cintre, et je suis très fiers de la pose.

    Je suis adepte maintenant, depuis plusieurs années, de la double guidoline. J’ai gardé la guidoline d’origine, et j’en ai posé une seconde par dessus, de 3 millimètres d’épaisseur. Si j’ajoute à ça des mitaines ou gants rembourrés, c’est d’un niveau de confort bien supérieur. Et pour les grosses mimines, la préhension est améliorée. Éprouvées la première fois sur les routes Mallorcaines. Reste à trouver l’emplacement correct pour la sonnette, car pour l’instant elle a un gros défaut, elle ne sonne pas. Gênant.

    Le train décolle (enfin, démarre), en route pour Granville. Là, je dois changer pour rallier Avranches, où j’ai réservé un emplacement de camping pour la nuit. Avant le grand départ demain.

    Ai je tout pris? N’est ce pas trop? Le dilemme sans fin, heureusement le volume des sacoches est limité, et ne permet d’emmener que l’essentiel. Mais il y a toujours une petite angoisse.

    Une jeune fille dans le train de l’autre côté du couloir a les paupières peintes avec un fard doré et pailleté, c’est incroyable, j’ai du mal à quitter ses yeux du regard. Elle semble très fatiguée, et a passé tout le trajet à dormir. Me laissant admirer ses paupières dorées. Elle s’apprête à descendre et je me dis que ce serait dommage de ne pas lui demander de prendre une photo, mon premier souvenir de vacances. Elle ne parle pas français, elle croit que je parle de ses cheveux, elle me montre une des petites nattes qui tombent du haut du crâne. Je lui dit « No no, your eyelids, they are so nice », Elle a un petit rire, dit non, j’insiste, elle hoche la tête finalement et accepte. « Don’t worry, it is just a picture. Close your eyes, please». Une seule prise, les parents attendent, le train s’arrête et tout le monde descend.

    Je descend à Granville et le train pour Pontorson est à quai en face. Pratique. Je suis à côté d’un couple qui va faire un morceau de la Veloscenie à vélo, avec une chienne. Le train a deux heures de retard, il s’est pris une biche me dit la contrôleuse. Elle a fait un message d’accueil comme si le train lui appartenait. Il interdit de téléphoner, veuillez vous déplacer dans les plateformes, c’est non fumeur, si vous n’avez pas de billet vous êtes dans l’illégalité. Etc etc. Après un tel message, on n’a qu’à se tenir à carreau.

    J’arrive à Avranches et rejoins mon camping que se trouve à une douzaine de kilomètres. À peine arrivé et je me fait une montée pour entrer dans le centre ville, 1,5km à 5,4%. Je n’ai pas un entraînement de fou pour ce voyage mais ça passe. C’est ensuite une longue descente pour arriver dans la zone de la baie. Au passage d’une trouée d’arbres, le mont apparaît sur la droite. Le temps s’est dégradé au cours du voyage, il fait très gris mais il y a assez de lumière pour bien le montrer. Il a des couleurs plutôt sableuses aujourd’hui.

    Je rejoins mon camping, j’arrive parfaitement dans la fourchette de temps indiquée. Les patrons du campings sont anglais et installés ici depuis quarante ans. je me dépêche d’aller à la boulangerie qui ferme dans 15 minutes et qui est le dernier commerce ouvert aujourd’hui dans le village. La serveuse est Biélorusse ! C’est le grand remplacement par ici!

    Retour au camping pour dîner, à côté d’une famille hollandaise, qui a rangé son emplacement comme il se doit. Les sacoches de vélo sont parfaitement alignées près des tentes, il n’y a rien qui traîne.

    Le ciel s’est éclaircit, il devrait faire beau demain.

  • Voilà c’est reparti pour un nouveau voyage.

    Voilà c’est reparti pour un nouveau voyage.

    Je me suis un peu traîné pour arriver à ces vacances, depuis un mois je me sens très fatigué, déjà c’était le cas quand je suis parti dans les Flandres. Là, pareil, je me suis pris un jour de repos car je me sentais trop fatigué. Pas la force de préparer mes affaires. Et comme j’ai trois semaines, je ne suis pas à un jour près. Ni même deux. En fait je pars demain dimanche, dans l’après midi, au lieu de ce matin. Probablement l’intensité de mon travail est devenue plus importante, je vieilli aussi, donc je supporte moins bien tout ça. J’ai annulé mon billet et en ai pris un autre. Et pour fêter cette décision pleine de sagesse, et dont je suis très fier, je me fais un déjeuner italien. En souvenir de mon voyage dans les Pouilles en début d’année. Il y a même des Taralli!

    Déjeuner avant les vacances. Souvenir de Puglia. Décidément, ce voyage m’a pas mal marqué. C’est tellement bon de ressentir l’intensité d’un voyage, des mois plus tard. On ne s’y attend pas, il n’y a rien qui laisse deviner qu’un voyage va être mémorable. Ça vient comme ça. C’est fort.

    Fort heureusement je peux encore voyager à vélo, et notre Europe propose un terrain de jeu infini à ces voyages. Et pour l’instant je ne me lasse pas. Voilà cinq ans que j’ai démarré les voyages à vélo. Mon premier, c’était quatre jours, un rodage, autour de l’île de France à 100km de distance de chez moi. Une vieille règle de l’époque de sortie du confinement. Autour du 14 juillet 2020. Depuis lors, toutes mes vacances ont été à vélo. Oui, quasiment toutes. Été, hiver, à toutes les saisons. Comme je fuis le tourisme, je vais au sud en hiver, et plutôt au nord en été. Et plutôt pas au bord de la mer. J’ai commencé bien sûr par la France que j’ai pas mal sillonnée, mais il me reste encore quelques régions à découvrir. Au passage, on se rend compte, encore plus à vélo, combien nous avons de la chance d’habiter en France, et de la diversité de paysages dont nous bénéficions. Et puis je suis parti en dehors de France, en Italie bien sûr, dès 2021, et depuis j’y retourne presque tous les ans. Ensuite l’Allemagne, le Danemark, la Suisse, l’Espagne. Et j’ai encore tellement de projets en tête. C’est réellement infini. Ça fait donc 5 ans que je voyage à vélo. Je n’en reviens pas. Jamais je n’aurais cru que je ferai du vélo comme ça.

    Il faut dire que c’est tellement facile. Un vélo, quelques affaires rangées dans un sac ou deux, un itinéraire, même simple. Et c’est parti. Une chose que je veux partager ici, au passage, c’est qu’il n’y a pas de petit voyage à vélo. C’est tout de suite grand. Il suffit de partir deux jours, voire un seul. À la découverte. Autour de chez soi. À l’aventure. Seul ou à plusieurs. À la découverte de l’inconnu. Vous savez, cette chose qui nous manque tellement, et qui nous nourrit. L’inconnu.

    Cette année, c’est le quatrième voyage que j’entreprends. Et c’est en France!

    La Bretagne. C’est un projet que j’ai en tête depuis très longtemps. D’abord parce que c’est une région que j’adore, où je suis allé enfant en vacances, étudiant en stage, où j’ai même habité pendant quelques années, à Brest. La nature est splendide, la lumière incroyable, le temps très divers… Le bord de mer est aussi pas mal varié, très différent entre les différents départements. Rien de commun entre le granit rose du nord et les abords du Morbihan au sud. Et c’est une région où j’ai pas mal d’amis. Comme quoi je suis loin d’être le seul à aimer cette région. Des gens originaires de la région et d’autres qui s’y sont installés. Et ce voyage, plus que la région de Bretagne, que je connais très bien, est l’occasion de revoir ces amis. Que, pour certains, je n’ai pas vu depuis très très longtemps. Donc une sorte de pèlerinage. Un peu comme mon voyage en Auvergne en 2021. Repasser dans beaucoup d’endroits que je connais parfaitement, en découvrir de nouveaux j’espère. Visiter les amis. Me baigner? Manger du far breton et du kouign amann. Des huîtres de pleine mer avec du pain beurré. Éprouver le vent, la pluie, le soleil, le brouillard. M’enivrer de musique et de vitesse. Tous les jours. Dormir. Recommencer.

    Alors accrochez vous au bastingage, je vous emmène au pays des cornemuses, des chapeaux ronds et des korrigans.