Otranto-Leuca

C’est ma dernière journée de descente vers le sud. D’ailleurs je quitte la mer Adriatique pour la mer Ionienne. Les deux mers sont séparées précisément par le Canale d’Otranto, large de 72km, entre l’Italie et l’Albanie . Mon voyage commence à avoir un petit goût d’Odyssée d’Ulysse au retour de la guerre de Troie. À force de longer la côte, de crique en crique, je m’imagine un peu sur mon navire Καννονδαλε Τοπστονε Καρβον. Je vais retrouver ma Pénélope ! Je m’emballe. Mais quand même, une odyssée est un « récit de voyage plus ou moins mouvementé et rempli d’aventures singulières ». J’aime bien penser que mes voyages à vélo et leurs récits sur ce blog forment une Odyssée.1,2

Je retourne à Otranto pour reprendre mon itinéraire. Il fait bien meilleur aujourd’hui, presque chaud. Je traverse la vieille ville et tombe à la sortie sur le château fort. Je jette un œil par acquis de conscience à Wikipédia, où j’en apprends de belles sur Joseph Fouché, mais surtout que la cathédrale contient la plus longue mosaïque d’Europe. 54 mètres de long. Ni une ni deux, je m’y rends. J’avais bien vu, la veille, la très belle façade de la cathédrale, mais il est vrai que depuis Lecce, je tenais à faire une pause dans la visite de cathédrales et autres basiliques. J’eu tort, car en effet le sol de la nef centrale est couvert d’une mosaïque qui représente un arbre de vie, et diverses scènes antiques et historiques. Son auteur s’appelle Pantaleone. Un moine.

Malheureusement on ne peut pas accéder ni voir la mosaïque de près, les bancs de prière cachant la plus grande partie.

Je vais donc jeter un œil à la crypte byzantine, en très bon état, et je suis le seul! Je remonte dans la cathédrale, et je suis également le seul. Je me dirige vers la porte et m’aperçois qu’elle est fermée! Je suis enfermé dans la cathédrale! Je me rappelle qu’il avait été annoncé au haut parleur « la cattedrale è chiusa “, mais j’avais fait celui qui ne comprends pas l’italien. Ce qui est vrai d’ailleurs. Bon, petite angoisse (quel jour sommes nous, combien de temps est elle fermée, vu l’épaisseur de la porte, ce n’est même pas la peine de frapper, personne n’entendra et je vais me tuer les mains…). Et j’en passe. Alors je jette un œil à la serrure, ce n’est pas une serrure mais une fermeture complexe avec des bras métalliques qui contiennent des trous dans lesquels viennent se mettre des pions métalliques… et je l’ouvre! Incroyable. Je n’ose y croire. Je sorts et referme comme je peux, quelques passants me voient et ont l’air un peu étonné de me voir sortir. J’entends une voix dernière moi et je vois un homme à la porte. Je lui fait signe de m’excuser, je dis « excuse me ». Je suis un peu gêné. Je comprends qu’il y a une autre porte ailleurs, plus normale. J’apprendrai que la cathédrale ferme à midi, jusqu’à trois heures. J’ai failli y rester trois heures, seulement.

Avec tout ça j’ai pris un peu de retard, donc je prends la route qui me mène à Santa Maria di Leuca (prononcer Léouca, qui veut dire blanc en grec). J’ai une grosse cinquantaine de kilomètres mais avec un peu de dénivelé. D’autant que je compte voir l’ancienne carrière de bauxite… qui ne vaut pas le coup de faxer à sa mère non plus!

Ce sera une très belle route surplombant la mer, avec pas mal de petites criques encaissées. Il y a quelques villages. Mais rien d’exceptionnel à mon goût. Non, l’essentiel est bien cette côte découpée, avec quelque Torre ici et là. Je m’arrête régulièrement pour observer le paysage, me rapprocher du bord en traversant une lande. La mer brille, je pense à Dominique.

J’arrive enfin à Leuca, il fait presque nuit, et j’ai droit à un coucher de soleil splendide sur le phare, dans une ultime descente.

Le phare de finibus terrae.

Je m’installe dans mon logement, une grande maison qui surplombe la ville, et la pointe, et le phare. Une famille habite là et loue des chambres dans cette maison bien trop grande pour eux. Le père m’indique un restaurant tout près.

Dîner pour goûter une des spécialités locales : Purea di fave e cicoria. Purée de fèves et feuilles de chicorée. Et croûtons. Pas mal. Les croûtons sont les bien venus pour ajouter un peu de mâche. C’est la première fois que j’en vois. Ça me rappelle qu’il faut que je goûte à nouveau l’autre spécialité des pouilles (en hiver) : Orecchiette con le cime di rapa. Orecchiette aux fanes de navet. L’autre fois, le plat était trop salé, donc disons que ça ne compte pas.

Une très belle journée.

  1. Je vous conseille la page Wikipedia Antonomase. On y apprend plein de chose, par exemple l’origine des mots mécène, ou poubelle, ou béchamel. ↩︎
  2. J’adore les notes de bas de page. ↩︎

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Commentaires

2 réponses à “Otranto-Leuca”

  1. Magnifique ! Merci François . Super voyage décidément … tu devrai envoyer cet article à Manou ça l’intéresserai beaucoup et Gp auss mais je ne sais pas comment faire , tu peux les abonner sur le e-mail de Serge ?

    1. Je vais m’en occuper

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